Côte d'Ivoire - la réconciliation impossible ?


Difficile de faire la paix, un an après la fin de la crise postélectorale. Les attaques répétées dans l'ouest de la Côte d'Ivoire et la violence du débat politique à Abidjan n'aident pas. Pas plus que les accusations de complot portées contre des proches de l'ancien président.

Diéhiba, Para, Saho, Sakré... Des villages attaqués les uns après les autres. La frontière avec le Liberia n'est pas loin et, en moins de deux mois, vingt-huit personnes (vingt civils, sept Casques bleus nigériens et un militaire) ont été tuées au cours de raids menés par des hommes en armes. Un an après la fin de la crise postélectorale, les violences ne se sont pas tues dans l'extrême ouest de la Côte d'Ivoire, compliquant le travail des humanitaires et le retour des réfugiés et des déplacés de guerre. Selon les Nations unies, 140 000 d'entre eux devaient pourtant rejoindre leurs villages cette année.(....)À Abidjan, pouvoir et opposition se renvoient la responsabilité de ces attaques. Si l'ONU reste prudente sur l'identité de leurs commanditaires, l'ONG Human Rights Watch (HRW) y voit la main d'anciens combattants pro-Gbagbo et de mercenaires libériens. Ces derniers seraient près de 400, qui s'entraîneraient dans des camps au Liberia et y recruteraient des enfants-soldats avant de passer la frontière. L'argent, ce sont d'anciens caciques du régime de Laurent Gbagbo qui le leur fourniraient. Ils le trouveraient aussi en exploitant des mines d'or artisanales. Ils auraient également de nombreuses caches d'armes en Côte d'Ivoire, dissimulées dans la forêt ou dans les villages. La végétation est dense, la frontière est poreuse et les assaillants passent facilement d'un pays à l'autre, compromettant les efforts de réconciliation. Les autorités ivoiriennes ont d'ailleurs affirmé, début juin, avoir déjoué un putsch ourdi par des pro-Gbagbo en exil.(...)

"Mercenaires de guerre"
« Ces mercenaires de guerre sont connus mais jamais interpellés », dénonce Laurent Akoun, le secrétaire général du Front populaire ivoirien (FPI, parti de Laurent Gbagbo). Surtout, reconnaît-on à Abidjan, ils entretiennent avec les FRCI un système d'activités illégales mais fort lucratives : trafic d'armes, exportation de cacao vers le Burkina Faso, exploitation aurifère, forestière, et vente de terres.
La police et la gendarmerie ont bien commencé à se redéployer dans la région, mais leurs hommes ne sont pas armés. Pour tenter de régler les conflits et d'apaiser les tensions, le ministère de l'Intérieur a également créé des comités d'alerte rapide composés de chefs traditionnels et de représentants des autorités locales, des partis politiques et de la société civile. Avec peu de résultats pour l'instant. Les préfets s'impliquent, eux aussi, dans la réconciliation, mais les autochtones n'ont guère confiance : leur champion est emprisonné à La Haye, et les fils de la région (Alphonse Voho Sahi, ex-conseiller et plume de Gbagbo, et Marcel Gossio, ancien puissant directeur du port d'Abidjan) sont en exil. Pour ne rien arranger, ils subissent chaque jour arrestations arbitraires, rackets et vexations en tout genre.(...)À ce jour, 148 personnes ont été formellement accusées de crimes commis pendant la crise postélectorale. Toutes faisaient partie ou étaient proches du régime de Laurent Gbagbo. Ce qui n'a fait que renforcer le sentiment d'une justice de vainqueurs et d'une situation d'impunité pour les forces qui ont porté Ouattara au pouvoir. Pour la société civile, toutes les questions sont intimement liées. « La réconciliation nationale passe par une remise à plat de tous les problèmes, plaide N'Gouan. Il faut trouver un consensus sur les questions de justice, de sécurité et de refonte de l'armée, de règlement des problèmes fonciers, de politique d'immigration et de naturalisation, de relance de l'emploi. » Les représentants de la société civile ont rencontré le président Ouattara le 16 mai au palais présidentiel d'Abid­jan. « Il paraît plus ouvert au dialogue, conclut N'Gouan. Gbagbo, lui, ne nous avait jamais reçus. »

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