Le nouvel homme fort de Centrafrique, le chef de la rébellion Séléka Michel Djotodia, a annoncé lundi qu'il allait suspendre les institutions du pays et légiférer par ordonnances pendant trois ans, au lendemain d'un coup de force condamné par la communauté internationale.
"J'estime nécessaire de suspendre la Constitution du 27 novembre 2004, de dissoudre l'Assemblée nationale ainsi que le gouvernement. Pendant cette période de transition qui nous conduira à des élections libres, crédibles et transparentes, je vais légiférer par ordonnances", a déclaré M. Djotodia dans un discours très attendu devant la presse.
Si M. Djotodia ne s'est pas explicitement autoproclamé président de la
République, il se pose clairement en nouveau maître du pays.
"En respectant l'esprit des accords de Libreville, je vais reconduire
le Premier ministre (Nicolas Tiangaye), chef du gouvernement d'union
nationale dans ses fonctions", a-t-il déclaré.
L'accord de paix signé le 11 janvier à Libreville mettait en place un
gouvernement d'unité nationale composé du clan au pouvoir, des rebelles
et de l'opposition. Mais les rebelles affirment qu'il n'a pas été
respecté par le régime Bozizé.
"Nous nous engageons à conduire désormais les destinées du peuple
centrafricain pendant cette période de transition consensuelle de trois
ans conformément aux accords politiques de Libreville", a-t-il ajouté
avant d'énumérer les principaux objectifs du prochain gouvernement,
notamment "restaurer la paix".
Reconnaissance de l'opposition
"Michel Djotodia est le nouveau président, c'est acquis. L'opposition
le reconnaît", a pour sa part déclaré le porte-parole du gouvernement
d'union nationale Crépin Mboli Goumba, opposant au régimé Bozizé, joint
par l'AFP.
Agé d'une soixantaine d'années, M. Djotodia est un ancien fonctionnaire
et diplomate - il a notamment été consul de Centrafrique au Soudan -
qui avait basculé dans la rébellion, en devenant l'un des principaux
animateurs depuis 2005.
Le Conseil de sécurité de l'ONU a "fermement condamné la prise de
contrôle par la force" en République centrafricaine et a "demandé la
restauration de l'ordre constitutionnel" et l'application des accords de
Libreville, dans une déclaration adoptée lundi soir.
L'Union africaine a suspendu lundi la participation de la Centrafrique à
l'organisation. Elle a également imposé des sanctions contre sept
responsables de la coalition rebelle Séléka, dont Michel Djotodia.
Les Etats-Unis ont condamné lundi "la prise du pouvoir par la force de
la coalition rebelle de la Séléka et la nomination d'un président par la
Séléka hors d'un cadre constitutionnel", sans toutefois appeler au
retour au pouvoir du président Bozizé.
Paris a condamné "le recours à la force ayant abouti à la prise de pouvoir" en Centrafrique.
L'Union européenne a qualifié d'"inacceptable" le changement "par la
force" du gouvernement en Centrafrique et appelé à "cesser immédiatement
toutes les hostilités, à faire preuve de retenue et à contribuer au
rétablissement de l'ordre public".
Deux indiens tués par erreur
Michel Djotodia a annoncé l'instauration d'un couvre-feu de 19h à 6h et
des patrouilles pour sécuriser la capitale, toujours en proie à la
violence et aux pillages.
Témoignant de la confusion qui règne dans la ville, deux Indiens ont
été tués lundi par erreur par des soldats français chargés de la
protection de l'aéroport de Bangui, a annoncé lundi soir le ministère
français de la Défense, qui a déploré "un drame".
Un autre Indien et un Tchadien ont également été blessés, a-t-on ajouté.
Les forces françaises sont intervenues "dans une situation
particulièrement confuse contre trois véhicules" qui menaçaient de
pénétrer dans l'aéroport alors même qu'elles venaient d'être l'objet de
tirs d'origine inconnue", écrit le ministère.
Le Premier ministre indien Manmohan Singh a fait part mardi de sa "profonde tristesse" après la mort de ses deux compatriotes.
Singh a précisé avoir reçu une lettre du président français François
Hollande lui faisant part de ses regrets et lui assurant qu'une enquête
serait menée.
L'ONG Médecins sans frontières (MSF) affirme dans un communiqué avoir
été victime de pillages et de vols, et demande "un accès immédiat aux
soins de santé pour la population".
"En raison de la forte violence et de l'insécurité qui régnaient à
Bangui, les opérations de MSF ont été gravement perturbées et des
blessés dans un état critique n'ont pu être opérés", déplore MSF.
Une journaliste d'une radio privée a rapporté que des rebelles étaient
venus piller les locaux, repartant avec "du matériel, mais aussi des
véhicules". "Nous ne pouvons plus travailler dans ces conditions",
a-t-elle confié sous couvert d'anonymat.
De nombreuses patrouilles rebelles circulaient lundi dans les rues de
Bangui, tirant en l'air avec des kalachnikovs, a constaté un journaliste
de l'AFP. Les magasins restaient fermés et les habitants se déplaçaient
à pied, souvent en petits groupes.
Le président déchu François Bozizé a fui Bangui pour se réfugier au
Cameroun, "où il se trouve actuellement dans l'attente de son départ
vers un autre pays d'accueil", a annoncé la présidence camerounaise
lundi.
Au moins treize militaires de la force sud-africaine qui avait été
déployée en Centrafrique ont été tués et 27 blessés dans des combats
pendant la prise de Bangui par les rebelles, a indiqué le président
Jacob Zuma, en annonçant le maintien pour l'instant du reste des troupes
sur place.
La rébellion avait lancé une première offensive le 10 décembre dans le
nord du pays et enchaîné victoire sur victoire face aux forces
gouvernementales désorganisées, avant de stopper sa progression sous la
pression internationale à 75 km au nord de Bangui.(afriquinfos)
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