Dans une allocution télévisée prononcée jeudi soir 30 octobre, le président burkinabè a annoncé la dissolution du gouvernement et la fin de l'état de siège décrété quelques heures plus tôt par le chef d'état-major de l'armée.
Mais surtout il se dit « disponible à ouvrir des
pourparlers pour une période de transition » à l'issue de laquelle il remettra
« le pouvoir au président démocratiquement élu ». Des propos qui sont loin de
calmer la colère de l'opposition, laquelle exige avant tout son départ du
pouvoir.
Me Bénéwendé Stanislas Sankara est le président du parti
sankariste UNIR-PS, et du Front progressiste sankariste, une des grandes
formations d'opposition. Il répond aux questions de Pierre Pinto.
RFI : Qu’avez-vous pensé de l’allocution télévisée de Blaise
Compaoré ?
Bénéwendé Stanislas Sankara : Vraiment ridicule ! A la
limite, Blaise Compaoré n’a pas encore appris la leçon. Je crois qu’il est en
train de ruser avec le peuple bukinabè. Nous attendions ce message où il allait
effectivement dire qu’il a compris et qu’il rendait sa démission pour soulager
le peuple burkinabè. Mais Blaise Compaoré veut, purement et simplement, avoir
du temps.
Je crois que la contradiction qui a existé entre lui et les
déclarations de ses généraux, dénote du fait qu’effectivement, il n’a plus
d’autorité. Et en plus du manque de légitimité, Blaise Compaoré doit purement
et simplement tirer les leçons. Mais s’il ne comprend pas, il nous invite une
fois de plus à continuer la mobilisation pour l’obliger cette fois-ci, à partir
du pouvoir.
Dans son discours, il propose une transition et un dialogue
avec l’opposition. Pour vous, cela est-il trop tard ?
Monsieur Blaise Compaoré n’a plus de parole d’honneur. Il ne
connaît pas la parole donnée ! Ça ne marche plus ! Quand le peuple en a marre,
il se met debout, il a ses exigences, il a ses aspirations. Nous ne pouvons pas
aller à contre-courant de notre peuple et de l’Histoire ! Ce 30 octobre,
l’histoire s’est jouée. Je pense que Monsieur Blaise Compaoré doit comprendre
tout ça. S’il veut d’un dialogue sincère et franc, il a eu le temps de le
faire. Il n’en a pas voulu. Trop, C’en est trop !
Quelques heures avant le discours de Blaise Compaoré, le
général Traoré, le chef d’état-major, avait lui-même proposé une période de
transition pouvant aller jusqu’à 12 mois. Le général Traoré est-il soutenu par
l’opposition ?
Le général Traoré a rencontré, selon lui, deux fois le chef
de l’Etat, avant de rencontrer l’opposition politique. Nous lui avons réitéré
nos préoccupations. A savoir, demander aux militaires de Blaise Compaoré, à ses
sbires, de ne plus tirer sur le peuple. Ensuite, nous avons pris note de la
dissolution. Pour nous c’était un coup d’Etat militaire ! Et la junte a été
claire pour décréter un état de siège. Nous avons dénoncé l’état de siège pour
appeler nos militants à continuer la mobilisation, la détermination jusqu’à ce
que Blaise Compaoré s’en aille.
Il vient de faire ce discours-là pour dire qu’en réalité il
reste, mais qu’il est prêt à transmettre le pouvoir. Mais qu’est-ce qui dit que
Blaise Compaoré ne veut pas ruser pour reprendre la situation en main ? Nous
connaissons l’homme. Ça fait 27 ans, ça fait combien de fois qu’il a modifié la
Constitution ?
Quelqu’un qui est
arrivé par un coup d’Etat, quelqu’un qui a été le premier à décréter l’état de
siège, je pense que ce n’est pas un démocrate. Ce n’est pas sincère. Nous
n’avons pas vraiment confiance en lui. Nous croyons qu’il veut reculer pour
mieux nous massacrer.
Mais avez-vous confiance dans le général Traoré ?
La confiance se mérite ! Le général Traoré a été nommé par
le chef d’Etat Blaise Compaoré à la tête de l’état-major. Nous sommes dans une
situation où effectivement il faut travailler à remettre la démocratie sur les
rails. Nous avons simplement dit au général Traoré que l’armée doit prendre ses
responsabilités dans le sens des intérêts supérieurs de notre peuple.
Maintenant, ue ce soit le général Traoré, que ce soit le général Kouamé Lougué,
un caporal ou un civil… L’essentiel, c’est que ce soit un homme qui inspire
confiance à tout le peuple.
Nous avons aussi insisté pour dire que la lutte de
l’opposition politique, ce n’est pas pour courir derrière des postes. Nous nous
battons pour la liberté, pour la justice dans ce pays ! Pour que la démocratie
retrouve sa plénitude ! Et que le pouvoir ne soit pas confisqué par la boulimie
d’un seul homme !
L’opposition aurait-elle préféré que ce soit par exemple, le
général Kouamé Lougué qui prenne les choses en mains ?
L’opposition politique, de mon point de vue n’a pas de
préférence ! L’opposition politique a son agenda. On s’attendait à des
élections propres, crédibles, en 2015, avec le départ de Monsieur Blaise
Compaoré. La situation s’est précipitée. Nous pensons que l’armée en son sein
doit jouer la cohésion d’unité nationale, trouver un homme de consensus qui
pourra, avec l’opposition politique et le peuple burkinabè, faire front. Pour qu’ensemble,
nous rétablissions les institutions dans les meilleurs délais, pour avoir le
soutien du peuple et repartir sur de nouvelles bases pour renforcer notre
démocratie.
Les institutions sont dissoutes. Vous ne reconnaissez pas le
maintien au pouvoir de Blaise Compaoré. Alors qui dirige le Burkina à l’heure
qu’il est ?
Le Burkina Faso est sans commandant à bord ! Le Burkina Faso
est dirigé par son propre peuple ! Maintenant, le peuple est à la quête de
dirigeants crédibles. Mais tout, sauf Blaise Compaoré !
Concrètement, que proposez-vous ? Une période de transition,
ou des élections le plus rapidement possible ?
Nous proposons une période de transition, ça c’est sûr. Nous
proposons que l’agenda électoral qui était en train d’être élaboré soit maintenu.
Mais effectivement, qu’on mette en place un organe transitoire qui va
travailler à ressusciter toutes les institutions, à ramener la sérénité,
l’ordre et surtout la discipline pour que les Burkinabè puissent repartir le
plus rapidement au travail.
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