Cameroun :La police saute sur des manifestants

Jusqu'à 9 h, l'heure prévue pour le début de la manifestation, il n'y avait pas grand monde à l'entrée de la morgue du Centre hospitalier universitaire de Yaoundé. C'était pourtant là le lieu de rassemblement et de départ prévu par les organisateurs. 
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Kah Walla, la présidente du  Cameroon People's Party (Cpp), était là, entourée d'une dizaine de ses lieutenants. Alentour, pas l'ombre d'une pancarte ou d'un policier en tenue anti-émeute. Les commerçants du marché Melen, juste en face, vaquaient paisiblement à leurs affaires. Y aurait-il un report de la manifestation devant l'Assemblée nationale des acteurs de la société civile après celui de 7h ce même mercredi 11 avril ?
 
C'est vers 9h 20 que les choses vont se précipiter. Des partisans du Cpp arrivent peu à peu de tous les coins. Ils apportent des tee-shirts jaunes aux emblèmes du parti et tiennent des tracts. Kah Walla, vêtue de son uniforme tennis, polo, pantalon noir et foulard drapé autour de ses dreadlocks, s’attèle à la distribution des tracts.
 
Police 
Des passants ainsi que des marchands ambulants la reconnaissent. Ils l'entourent, l'assaillent de questions, veulent tout savoir et, surtout, la toucher. La foule gonfle. Kah Walla multiplie interviews et déclarations. Elle sent une grande adhésion à ses propos. « Non, ils doivent nous consulter d'abord avant d'aller discuter de ces questions à l'Assemblée nationale », harangue-t-elle.
 
Pendant ce temps, une de ses fidèles, arrivée de Douala avec elle, sort d'une voiture avec un immense sac en plastique. Dedans, des bandelettes d'étoffes blanches. « C'est pour montrer à la communauté internationale que nous sommes muselés dans notre pays », explique malicieusement un militant en se bâillonnant avec l'étoffe. Kah Walla se détourne des micros et s'aperçoit qu'autour d'elle il y a plus d'une quarantaine de personnes bâillonnées. Elle donne le signal de départ vers l'Assemblée nationale.
 
Vexations
La petite troupe s'ébranle et marche d'un pas décidé. On dépasse le carrefour Chu. Les tracts sont distribués à tour de bras aux taxis qui n'hésitent pas à s'arrêter et à des passants avides de recevoir les bouts de papier. Le cortège s'étoffe. Des badauds s'ajoutent à la manifestation, visiblement plus pour marcher à côté de Kah Walla que pour la cause. Au lieu dit carrefour Emia, ce sont des militaires qui réclament les tracts. Les manifestants avancent paisiblement à bonne allure. Deux cent mètres plus loin, un peu avant le carrefour du Cetic Ngoa-Ekellé, un officier de police de deuxième grade, une dame très excitée, barre la route aux marcheurs. Elle ordonne aux deux policiers qui l'accompagnent d'arracher les caméras des journalistes.
 
Elle bloque tout le monde et appelle des renforts qui ne tardent pas à arriver. En très peu de temps le carrefour est en partie bloqué. Un échange a lieu entre Kah Walla et les policiers. La policière, bien maladroite, est suppléée par un collègue homme du même grade. Il explique à Kah Walla : « Vous n'avez pas d'autorisation pour manifester. » Elle lui rétorque : « Je n'ai pas besoin d'autorisation pour marcher sur les trottoirs dans mon pays. » Le dialogue se poursuit une trentaine de minutes. Des centaines de personnes agglutinées se délectent de la répartie de la pétroleuse. A la surprise des policiers qui rappliquaient de plus en plus nombreux, et de plus en plus lourdement armés, Kah Walla se retourne vers ses militants et leur ordonne de faire demi-tour pour le siège du parti où elle promet une conférence de presse.
 
Joseph Désiré Som I
Une fois la candidate à la présidentielle du 9 octobre dernier partie, les policiers arrêtent Joseph Désiré Som I, le secrétaire général du Cpp, ainsi qu'un de ses camarades, pour les conduire au commissariat central n°1. La manifestation se disperse au carrefour Emia aux environs de 10h 30.
 
Tout le monde s'en va. Mais, pas dans la même direction. Tandis que les uns suivent les personnes interpellées, les autres accourent vers l’Assemblée nationale où on annonce que l'ambiance est chaude.
 
Le forum de la société civile pour la démocratie a prévu de donner à mains propres au président de L'An, une lettre afin que ce dernier les autorise à participer aux débats sur le projet de loi 911. Une vingtaine de gendarmes et des policiers casqués et armés jusqu'aux dents attendent. Hervé Nzouabet de l'Addec, Rolande Bechon des Nouveaux droits de l'homme, Philippe Nnanga de Un monde à venir ainsi que deux autres militants vont être interpellés. Tous les sept interpellés ont été libérés après plusieurs heures de vexations.
Lu sur quotidienlejour
 

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