Lettre ouverte au président de la République - Les tendances politiques actuelles n’augurent rien de bon

Cela fait exactement 62 semaines, soit depuis un an et trois mois, que je me suis mis gracieusement à votre service, c’està- dire au service du Niger et de son peuple. Durant tout ce temps, j’ai en vain essayé d’attirer votre attention sur certaines vérités que l’on ne saurait cacher au chef ainsi que sur les dérives d’une gouvernance minable que nous avons cru avoir ensevelie dans les profondeurs insondables d’une histoire politique à oublier.







Que dis-je ? Plutôt d’une histoire politique à ressasser, pour la raison, simple mais valable, qu’elle est suffisamment chargée de leçons et qu’elle doit être notre lanterne, le faisceau qui éclaire notre voie. Cela fait donc, je disais, 62 semaines, que je vous écris sur la vie de la nation. Ce faisant, je ne me fais aucune illusion, mes lettres ayant un goût trop amer pour plaire, à fortiori susciter les réactions attendues pour un sursaut républicain indispensable à la consolidation de la démocratie et de l’état de droit, au raffermissement de la cohésion nationale et de la stabilité institutionnelle et politique de notre pays. C’est que, bien que fils de paysan, je n’en suis pas moins un enfant de la République, un fils du Niger qui vit les mêmes peines, les mêmes craintes et les mêmes angoisses que mon frère ou ma soeur du Manga, du Ténéré, du Zarmanganda ou encore du Damagaram. C’est au nom de tous ces Nigériens, bruyants ou silencieux, que je vous écris. Et je vous sais gré, à défaut de pouvoir me répondre, d’avoir lu régulièrement cette lettre avec intérêt. C’est un motif suffisant de satisfaction ou plutôt de consolation. Ma consolation, c’est aussi de savoir que les Nigériens, tous bords politiques confondus, sont sensibles à ce que j’écris chaque semaine et lisent cette lettre avec tout autant d’intérêt que vous.

Monsieur le Président, nous sommes pratiquement à neuf mois des élections générales de 2016 au cours desquelles, notamment, votre fauteuil sera remis en jeu. J’ai d’ailleurs constaté que votre parti ainsi tous ces hommes et femmes qui vous ont accompagné et soutenu dans cette sordide direction prise en août 2013, se grouillent comme des fourmis dans une fourmilière pour le succès de l’improbable. Au mépris de tous les risques que cela fait courir au Niger. L’improbable, c’est votre réélection à la tête de l’État. Vous avez posé tellement d’actes lourds négatifs qu’il est impossible, même dans un pays comme le Niger où la pauvreté peut engendrer des comportements contraires à la norme, d’inverser les tendances en si peu de temps. Je ne reviendrai pas sur tous ces sales dossiers qui ont pourri votre magistère. Cependant, je tiens à souligner que les blessures sont si ouvertes, si fraîches, que vous ne pouvez pas les guérir d’ici à janvier 2016. Au contraire, vous risquez même de vous retrouver seul, isolé de tous. 

Comme je vous l’ai dit à maintes reprises, les leaders politiques qui ont accepté de vous soutenir et de vous accompagner ont, chacun, des raisons objectives et personnelles à la fois, qui les ont déterminés à vous accorder leurs voix. Mais, un choix reste un choix. Il est forcément la photographie d’un instant, d’un contexte et de circonstances qui l’expliquent et qui peuvent, éventuellement, le justifier. C’est dire qu’il ne peut lier indéfiniment, particulièrement dans l’arène politique où la responsabilité d’État que l’on revendique commande de se remettre sans cesse en cause. Dans le cas d’espèce qui nous concerne, un leader politique peut-il accepter, au nom d’une alliance quelconque, de fermer les yeux sur des dérives certaines qui risquent de compromettre les causes sacrées de la République et de la nation ? Pour être précis, est-il acceptable pour Moussa Moumouni Djermakoye, Hamid Algabit et Cheffou Amadou, de continuer à ruminer leurs déceptions et leurs craintes pour le Niger alors que tous les feux sont au rouge ? Croyez-vous sincèrement qu’ils vont jusqu’au bout, apporter leur caution et leur soutien à ce qui s’apparente à un désastre pour le Niger et son peuple ? 
Vont-ils accepter et cautionner la situation de blocage dans laquelle vos choix personnels ont conduit ce pays ? Je n’en suis pas sûr et c’est pourquoi je dis que vous risquez de vous retrouver en fin de compte seul, isolé dans une logique qu’en réalité, aucun de ces leaders politiques ne partage. Ils vont, à un moment ou à un autre, prendre leurs responsabilités devant le peuple, en se démarquant de cette politique qu’ils savent pleine de périls pour un peuple nigérien épris de paix. J’ai déjà appris qu’un de ces leaders, inquiété par l’allure que prennent les évènements politiques, a récemment martelé ses vérités en affirmant clairement qu’il ne saurait être question pour lui d’accepter, sans broncher, les conditions politiques dans lesquelles les prochaines élections risquent d’être tenues.

Monsieur le Président, je l’ai dit et je vais me répéter, pour le bonheur de ce peuple — le mien — que j’aime beaucoup, dans sa diversité et ses richesses. Il n’ya pas pour vous meilleur gage de succès que la paix et la quiétude sociale. Si vous échouez sur ce chapitre, alors vous avez échoué partout. Seyni Kountché [Paix à son âme] dont nous savons l’attachement sourcilleux à la paix et à la quiétude sociale, disait que sans paix et sans quiétude sociale, il n’y a rien d’autre à espérer dans un pays. 
Or, les tendances politiques actuelles n’augurent rien de bon. Elles sont plutôt chargées de périls majeurs. En effet, j’ai entendu des compatriotes minimiser les risques de confrontation, au motif que l’ARDR fait dans le bluff. Une telle attitude ne peut être que le fruit de la passion aveugle du parti pris. Elle ne peut être productrice de sagesse. Pour ma part, je considère que le Niger est à nouveau à la croisée des chemins. Et nous ne pouvons évoluer que vers des situations de blocage de plus en plus inextricables.
 Et pour cause ? Je sais que vous ne vous remettrez jamais en cause. Or, les menaces se font persistantes. Le 21 mars 2015, fidèle à son devoir de mise en garde, l’ARDR a encore rendu public un communiqué dans lequel elle a dit ceci : « Pour l’ARDR, les élections prochaines auront lieu Incha Allah dans la transparence et l’équité, ou n’auront pas lieu. Elles se tiendront sous la supervision d’institutions démocratiques neutres et impartiales ou ne se tiendront pas. Elles se tiendront Incha Allah avec une Cour constitutionnelle indépendante, impartiale et consensuellement acceptée par tous ou ne se tiendront pas ». Il y a dans ces propos de quoi faire réveiller un mort.
Monsieur le Président, tous les feux sont au rouge. Et je ne vois même pas d’alternative crédible à votre situation. Il y a quelques mois, au plus fort moment de la campagne de dénigrement contre Hama Amadou, j’ai lu ici et là que le président légitime de l’Assemblée nationale a joué et perdu. À l’époque déjà, je souriais. Aujourd’hui, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts et à moins de persister dans la cécité, il me semble difficile que les mêmes individus puissent tenir le même jugement. En tout cas, en ce qui me concerne, je pense, sur la base de tous les éléments dont je dispose, que c’est vous qui avez joué et perdu. Vous avez perdu dans un jeu de quitte ou double dans lequel vous vous êtes donné le privilège de distribuer les rôles, persuadé que vous vous étiez donné le plus beau, le plus porteur et le plus productif. 

Vous avez joué et perdu. Et le temps, qui s’écoule inexorablement, va le rendre de plus en plus évident. Pour moi, vous menez un simple baroud d’honneur. Encore que, dans les conditions politiques actuelles, j’exagère en parlant de baroud d’honneur qui ne peut se comprendre que dans le respect des règles du jeu. Imaginez-vous, Monsieur le Président, des élections générales au Niger dont sont exclus le MNSD Nassara, la CDS Rahama et le MODEN Fa Lumana africa ? Imaginez-vous un seul instant une présidentielle, au Niger, dont sont exclus Mahamane Ousmane, Seïni Oumarou et Hama Amadou ? Assurément, l’affaire est gâtée, comme diraient les Ivoiriens. Et pour ne rien arranger, j’ai constaté que le RDP Jama’a a également attrapé le virus téléguidé de la division. Mohamed Ben Omar, votre artificier, a cru devoir bousculer tout pour « déposer » Hamid Algabit qui est accusé d’avoir plongé le parti dans une léthargie totale. Et dire que c’est le secrétaire général du parti, celui-là même qui est sensé donner une âme au RDP Jama’a, qui l’en accuse. C’est une autre affaire qui va bientôt ajouter au trouble nigérien dans la mesure où, fidèle à ses habitudes de putschiste, Ben Omar ne semble pas s’embarrasser des contraintes et obstacles liés aux textes du parti. Avec quelques camarades « travaillés », il a entrepris, contre vents et marées, d’arracher le parti de feu Ibrahim Maïnassaré Baré.
C’est dans l’air du temps et personne n’en est surpris. Monsieur le Président, je réitère mon voeu de la semaine passée : le 6 avril prochain, ne vous attardez pas sur votre bilan ; prenez plutôt des résolutions qui montrent clairement qu’aucun sacrifice n’est de trop lorsqu’il s’agit d’éviter au Niger des tourments inutiles.
http://nigerdiaspora.net



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